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dimanche 24 mai 2009

Orgueil et Préjugés: Angleterre, ma douce aimée...


Juste après avoir conclu la saison 6 de The Shield dans le bruit et la fureur, je cherchais quelque chose susceptible de me faire poursuivre dans cette voie. Manque de bol j'ai égaré A bout portant avec Lee Marvin, mais je tombe par hasard sur l'adaptation du roman de Jane Austen, Orgueil et préjugés, toujours sous blister et qui me nargue.
Le changement de ton va être brutal.

Inconsciemment, j'en suis venu à ne pas apprécier les films en costume. Il y a quelque chose dans cette recherche d'authenticité qui me glace le sang et m'empêche de m'intéresser aux exaction de chacun. Même Sofia Coppola et son Marie-Antoinette (l'histoire avant tout d'une jeune fille dépassée par les évènements) n'aura pas réussi à me passionner.
Mais ici, c'est avec une franchise et une retenue toute anglaise que le film se prend à suivre les destins des filles Bennett, élevées avec un amour et un naturel semblant hérités du côté désargenté de la famille (un problème à cette époque). Pleines de vie et de fougue, les filles sont sans cesse encadrées par une mère qui croit bien faire en voulant à tout prix les marier avant la mort de leur père, pourtant bien présent (et spectaculairement moderne, ou tout simplement sain d'esprit). S'ensuivent roucoulades, bals typiques à teneur sociales et stratégies d'amour, où se distinguent du lot quelques histoires s'entrecoupant de tragédies.

Sur un postulat de base pareil, difficile de croire le film si réussi. Et pourtant on s'esclaffe avec les personnages, on s'inquiète de leurs choix et des épreuves qu'ils traversent. On s'indigne presque de ces ellipses gracieuses nous privant de joutes verbales savoureuses, où être direct dans son intention n'est rien de moins qu'impossible. Loin de sentir la naphtaline, le film est magnifique, baignée d'une atmosphère troublante et les personnages se meuvent avec une grâce qu'on croirait héritée d'un naturel désarmant. On sent les péripéties arriver, et lorsqu'elles se produisent, c'est finalement réjouissant. Le film dure seulement 1h55, et c'est peut-être ça le pire : on quitte cette joyeuse assemblée beaucoup trop tôt, avec cette sensation de les avoir toujours connus et de devoir les abandonner à leurs destins magnifiques.

Keira Knightley persiste dans ces rôles égarés dans le temps, avec toujours la même présence charmante. Son côté garçon manqué en fait la candidate idéale à ce rôle de jeune fille décidée à vivre comme elle l'entend (cf. la séquence du refus d'épouser Mr Collins, amenant la non moins superbe séquence où son père vole à son secours). Ne tirant pas constamment la couverture à elle, Keira Knightley compose avec aussi un joli casting de jeunes anglaises, vues par-ci par-là : Rosamund Pike est parfaite en sœur à marier, touchante de sensibilité, parfois naïve et resplendissante à tous moments (il est loin le temps tout pourri de Meurs un autre jour). Kelly Reilly (des Klapischeries) campe une aristocrate de pouvoir tendant à tout contrôler, son frère en premier lieu. Et rappelle qu'être rousse, ça se mérite. Stupéfiante.
Parmi les 4 sœurs de Elizabeth (Keira Knightley), on retrouve aussi Jena Malone, à jamais petite amie de Donnie Darko dans nos cœurs décharnés par le film mélancolique de Richard Kelly. Sa petite sœur et complice dans le film, Kitty, est interprétée par Carey Mulligan, qui ne cesse depuis d’irradier les écrans de son talent à chaque apparition.

Keira Knightley et Rosamund Pike, sœurs comlices chez Joe Wright
Absolument pas niais dans ces démêlés avec l'amour, le film est parfois aussi très drôle grâce aux 5 filles de Joe Bennett, jeunes filles plus ou moins âgées rêvant toutes du prince charmant, se tirant la couverture quand un jeune homme pointe le bout de son nez. Le père les couvant est incarné par Donald Sutherland : choix judicieux de casting, la stature de l'homme se prêtant parfaitement au rôle de patriarche un peu plus moderne que sa femme, voulant pour ses filles des mariages d'amour plutôt que d'argent. Choc que personne n'attendait : la dernière scène du film, une scène de confrontation avec Keira Knightley, est magnifique d'authenticité et de naturel. On pourrait finir un film parlant d'amour par un baiser, Joe Wright choisit ici l'embrasure d'une porte d'où l'on perçoit les larmes d'un père ému par sa fille.

Loin de simplement mettre en image le roman de Jane Austen, Joe Wright stylise habilement tout son film. Du plan séquence ouvrant le film où l'on suit Keira Knightley se déplaçant dans la maison familiale, aux séquences de bals, en passant par la campagne pluvieuse et souvent onirique d'une Angleterre à jamais perdue. Wright s'égare et trouve même une astuce de mise en scène originale : alors que les masques semblent tomber, le lord Darcy et Elizabeth, alors en pleine joute lors d'un bal, se retrouvent tout d'un coup seuls à danser dans une pièce vide, avant que la réalité ne reprenne le pas sur ce moment rêvé. La caméra se balade entre les chambres vaporeuses, les demeures guindées et la nature omniprésente avec une grâce qui fait plaisir à voir.
Un film tout entier guidé par un classique du roman, aux atermoiements classiques mais si vraies, et une franche réussite au final. Orgueil et préjugés marque par sa simplicité, ses actrices au diapason et redonne le sens des priorités : pitié, quand aura-t-on l'occasion aimer ?


- Une scène supplémentaire (maladroite) clôture le film dans sa version US, dispo en bonus sur le DVD.
- Dans un registre similaire, se pencher sur Reviens-moi (Atonement en anglais), qui poursuit la brillante collaboration entre le réalisateur Joe Wright et Keira Knightley. James McAvoy, désarmant, complète le casting en amoureux transi au fil du temps qui passe, dans les tumultes de la Seconde Guerre Mondiale.

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